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Fait marquant

Dans le graphène, un atome d’hydrogène réalise un défaut topologique très recherché : un vortex de Kekulé


​​​​​​​​​​​​​Des physiciens de Pheliqs/Lateqs ont mis en evidence qu'un vortex de Kékulé, un défaut topologique très attendu, se forme au voisinage d'un atome d'Hydrogène greffé sur le graphène.​

Publié le 23 mai 2024

​​Le polyacétylène est un polymère organique unidimensionnel. Sa longue chaine d’atomes de carbone consiste en une alternance de liaisons covalentes simples et doubles qui stabilise la molécule. Il existe alors deux configurations électroniques de même énergie (cf. Fig.1a). Lorsqu’elles coexistent au sein de la molécule, un état lié appelé soliton se retrouve piégé à l’interface. Ce soliton possède une charge neutre Q=0 et un spin S=1/2. En dopant la molécule, il acquiert une charge Q=±e, mais son spin devient nul S=0. Ces relations spin-charge sont remarquables. Elles ne peuvent pas être obtenues à partir de combinaisons des constituants élémentaires du système, comme les électrons et les trous qui sont des fermions chargés caractérisés par S=1/2 et Q=±e. Les relations spin-charge du soliton résulteraient ici de la fractionalisation de la charge électrique élémentaire e.​​

Ce phénomène fascine d’autant plus les physiciens, qu’il pourrait jouer un rôle clé dans le transport à la surface de certains isolants et le développement d’ordinateurs quantiques dits « topologiques » avec des opérations plus robustes aux perturbations externes …

​​Des chercheurs de l’équipe PHELIQS/Lateqs, en collaboration avec une équipe internationale, ont découvert qu’il était possible de stabiliser chacune de ses configurations dans des régions différentes de l’espace [2] (cf. Fig.1c). Pour lever cette dégénérescence, ils ont brisé l’invariance par translation tout en préservant la symétrie d’ordre 3 en greffant un atome d’hydrogène sur une feuille de graphène. L’atome d’hydrogène se lie de façon covalence à un atome de carbone, ce qui force les électrons du graphène à se réorganiser en son voisinage. En imageant la distribution des états électroniques avec un microscope à effet tunnel, les chercheurs ont observé la coexistence de chacune des trois configurations de Kekulé dans trois orientations différentes autour de l’atome d’hydrogène (cf. Figs.1d,e). Ils ont aussi montré que pour pouvoir passer d’une configuration à l’autre, les états électroniques accommodent leurs phases de façon continue, ce qui se traduit par l’existence d’un vortex dont le cœur est matérialisé par l’atome d’hydrogène (cf. Fig.1f). Cela réalise donc le fameux vortex de Kekulé. Son observation est corroborée par trois méthodes théoriques complémentaires, ce qui rend le résultat très solide et permet de montrer que la charge du vortex est une mesure de la phase de Berry des électrons relativistes du graphène.

De façon analogue au polyacétylène, la coexistence des différentes configurations électroniques de Kekulé dans le graphène conduit à la formation d’un état quasi-lié, ici au coeur du vortex, et qui possèderait une charge fractionnaire [1]. Cette première observation du vortex de Kekulé relance donc l’intérêt de la communauté pour de nouvelles preuves indiscutables de charges fractionnaires dans le graphène.


Figure 1: a) Représentations d’une molécule de polyacétylène. Chaque lien représente une liaison covalente simple. Chaque sommet représente un atome de carbone portant un atome d’hydrogène. Les atomes de carbone alternent liaisons simples et doubles, ce qui autorise deux configurations électroniques de même énergie (I et II). Lorsque les deux coexistent au sein d’une molécule, un état lié (point noir) peut exister à l’interface avec une charge électrique Q et un spin S bien diffé-rents de ceux attendus pour un état électronique. b) Représentations des trois configurations élec-troniques de Kekulé du graphène. Les liaisons sont plus fortes dans un cycle benzénique sur trois matérialisé par un cercle dans un hexagone sur-imprimé. Chaque configuration définit un para-mètre d’ordre ayant pour valeur 0, 2π/3, 4π/3. c) Possible coexistence des trois configurations autour d’un point de symétrie 3, où peut se former un état lié avec une relation spin-charge inha-bituelle. d) Image résolue par microscopie à effet tunnel de la surface de graphène en présence d’un atome d’hydrogène. Le signal Kekulé, matérialisé par les hexagones sur-imprimés, peut être extrait de l’image brut. e) Amplitude du signal Kekulé extrait de l’image brut. f) Phase du signal Kekulé extrait de l’image brut qui montre un enroulement de 2π autour de l’atome d’hydrogène.

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