Le faible coût et la facilité d’utilisation des lampes à mercure, émettant à 254 nm, ont joué un rôle essentiel dans l'adoption généralisée de la technologie de désinfection UV. Cependant, ces lampes présentent plusieurs inconvénients, notamment une durée de vie courte, un allumage lent et le risque de fuites toxiques. Le remplacement de ces lampes par une technologie à base de semi-conducteurs offre une solution plus sûre et plus en adéquation avec les objectifs de durabilité. Néanmoins, les performances actuelles des lampes LED UV à base d’AlGaN, émettant à 270 nm, restent relativement modestes, et se détériorent encore plus elles lorsque l'on considère des longueurs d'onde plus courtes. En plus des problèmes d'efficacité, les lampes LED partagent avec les lampes à mercure le problème de l'émission à 254-270 nm, qui est fortement cancérigène et cataractogène.
En réponse à ces défis, on observe récemment un essor de la recherche pour le développement de sources dans l’UV-C lointain, émettant autour de 230 nm. Cette radiation ne pénètre pas (dans) la peau humaine ni (dans) les yeux, ce qui en fait un choix plus sûr pour la désinfection des espaces occupés. Dans cette plage spectrale, une alternative aux lampes LED est celle des lampes à faisceau d'électrons [1] où la puissance électrique est injectée dans le semi-conducteur par un faisceau d'électrons émis par une cathode froide. Cette technologie présente l'avantage de ne pas nécessiter de dopage de type p ni de contacts, ce qui en fait un choix prometteur pour l'éclairage UV-C. Les dispositifs pompés par des faisceaux d'électrons et utilisant de l'AlGaN comme matériau actif ont connu des avancées notables en termes d'efficacité et de puissance de sortie. L'intégration de boîtes quantiques en AlGaN offre un grand potentiel pour améliorer davantage les performances de ces lampes, grâce à l'efficacité quantique interne intrinsèquement élevée des boîtes quantiques.
Des chercheurs de Pheliqs, en collaboration avec l'Institut Lumière Matière (Université de Lyon), le CNRS-Institut Néel et le CEA-Leti, ont réussi à démontrer avec succès des structures de boîtes quantiques en AlGaN pouvant être ajustées pour émettre dans la plage de 230 à 270 nm en modifiant les paramètres de croissance par épitaxie par jets moléculaires. Ces boîtes quantiques atteignent systématiquement une efficacité quantique interne d'environ 50 % sur l'ensemble de la gamme spectrale. De plus, elles présentent des rendements énergétiques supérieurs à ceux des LEDs AlGaN dans la fenêtre spectrale à 230 nm [2].
En résumé, nos recherches marquent un jalon important dans le développement de sources UV-C efficaces et sans danger pour la désinfection UV. Elles fournissent des informations précieuses sur l'utilisation potentielle d'émetteurs à base d'AlGaN pompés par des faisceaux d’électrons pour cette application cruciale. Nos efforts actuels portent sur la réduction de la largeur spectrale [3] et l'amélioration de l'efficacité d'extraction de la lumière. De plus, nous travaillons activement sur de nouvelles conceptions de cathodes pour prolonger leur durée de vie et augmenter leur capacité à fournir des densités de courant élevées, le tout dans le but ultime de permettre la production de lampes de désinfection UV sûres d'une puissance de plusieurs milliwatts.
Recherche soutenue par l'ANR via les projets FUSSL (ANR-22-CE09-0024) et ASCESE-3D (ANR-21-CE50-0016).
Figure 1 : (a) Image de microscopie électronique à balayage en champ clair de deux couches de boîtes quantiques en AlGaN. L’arrangement des boîtes quantiques est compact, avec une hauteur d'environ 1 nm et un diamètre à la base de 5-7 nm. (b) Description schématique de la lampe UV-C ciblée, contenant le semi-conducteur avec des boîtes quantiques en AlGaN, et la cathode froide dans une enveloppe sous vide.
Figure 2 : Spectres d'émission de cathodoluminescence (CL) d'échantillons de boîtes quantiques avec différentes concentrations d'aluminium dans les boîtes.