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Fait marquant

Dynamique des électrons dans un supraconducteur


Dans cette nouvelle étude, des chercheurs de notre laboratoire ont étudié la dynamique des électrons dans un nanofil de niobium supraconducteur. L’injection d’un très petit nombre d'électrons suffit à réduire drastiquement le courant critique circulant dans un supraconducteur. En cause, l’accumulation d’électrons énergétiques, issus des paires de Cooper brisées par ce très faible courant d'injection.

Publié le 15 février 2023
Dans l’état fondamental d’un supraconducteur, les électrons s’apparient pour former des paires dites de Cooper. La température, un champ magnétique, un courant électrique ou un photon incident peuvent briser ces paires pour restituer des électrons célibataires aussi appelés quasi-particules. La présence de quasi-particules est donc le signe d’un affaiblissement des propriétés supraconductrices, ce qui peut nuire au bon fonctionnement de circuits supraconducteurs tels que les Qbits ou, au contraire, être mis à profit pour réaliser des détecteurs de photons.


Dispositif expérimental. Le nanofil est au centre de l’image (encadré rouge). La pointe du STM, symbolisée par le triangle bleu, permet d’injecter un courant électronique It dans le nanofil par effet tunnel (sans contact). Simultanément, le courant critique du nanofil Ic est détecté quand une tension Vnanofil apparaît à ses bornes.

Nous avons étudié la dynamique de formation des quasi-particules à l’aide d’un microscope à effet tunnel (STM) fonctionnant à très basse température (50 mK). Un STM permet en effet d’injecter localement des électrons dans un dispositif en contrôlant à la fois leur énergie, par la tension électrique Vb, et leur taux d’injection, par le courant tunnel It. Chaque électron injecté cède alors son énergie au supraconducteur soit par interaction Coulombienne directe avec les paires de Cooper, soit par l’intermédiaire d’un phonon, c’est-à-dire une vibration du réseau atomique. Chaque paire de Cooper brisée libère ainsi deux nouvelles quasi-particules très énergétiques qui vont à leur tour se désexciter en brisant d’autres paires de Cooper. Cette cascade conduit à la formation d’un nuage de quasi-particules, réalisant ainsi un point chaud qui peut limiter le courant critique Ic qu’un dispositif supraconducteur est capable de transporter sans transiter vers son état normal. C’est ce que nous avons mis en évidence en injectant des quasi-particules dans un nanofil de niobium de 300 nm de large et de 2 µm de long et en mesurant simultanément son courant critique. Ce dernier, d’une valeur d’une centaine de micro-ampères, a pu être fortement affaibli par un courant tunnel un million de fois plus faible. Nous avons démontré que cet affaiblissement est proportionnel au produit It Vb. Il est donc principalement dû à un effet de chauffage bien décrit par un modèle thermique, mettant ainsi fin à un débat sur un hypothétique effet de champ électrique proposé dans la littérature pour expliquer la dépendance de Ic avec une tension de grille dans un transistor supraconducteur. Il s’agissait en réalité d’un artéfact de mesure dû aux courants de fuite entre la grille et le nanofil supraconducteur dont l’effet avait été jusque-là sous-estimé.

De plus, en examinant de petits écarts au modèle thermique mesurés pour différentes valeurs du courant tunnel, nous avons pu modéliser la dynamique de formation du nuage de quasi-particules et déterminer un temps de relaxation de leur énergie de l’ordre de 40 ps. Cette information est fondamentale pour tenter d’optimiser les performances des détecteurs de photons ou protéger les Qbits de l’empoisonnement par des quasi-particules. 

Mesure du courant critique en fonction de la tension d’injection pour différents courants tunnel. Le trait horizontal en pointillés indique la valeur du courant critique sans quasi-particules injectées. 

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