Depuis plus de cinquante ans, l’industrie de la micro-électronique s’est attelée à réduire la taille des transistors présents dans nos ordinateurs et autres appareils électroniques, arrivant à des tailles critiques de l’ordre d’une dizaine de nanomètres. D’un autre côté les chercheurs académiques ont développé un nouveau paradigme pour l’informatique basé sur la physique quantique pour lequel l’unité d’information n’est plus un bit « 0 » ou « 1 » mais un bit quantique |j>= a|0> + b|1> nommé qubit. Les qubits peuvent être réalisés sur différents supports physiques comme par exemple les photons, les jonctions Josephson (jonctions supraconductrices), les noyaux et les électrons. Pour ces derniers l’état de spin (moment magnétique intrinsèque) peut être utilisé, on parlera alors de qubit de spin.
Une collaboration entre les chercheurs de notre laboratoire et du CEA-LETI, unités mixtes de recherche CEA-Université Grenoble Alpe vient de mettre en évidence que les très petits transistors fabriqués par la technologie grenobloise silicium sur isolant (SOI) sont de parfaits candidats pour la réalisation de qubits de spin. En effet nous avons montré que les transistors une fois refroidis à une température proche du zéro absolu se comportent comme des pièges à électrons, permettant ainsi l’étude de l’état de spin d’un électron unique.
Plus subtilement nous n’avons pas étudié un électron mais plutôt un trou d’électron, particule de charge et de mouvement opposés à l’électron, pour lequel nous avons mis en évidence que l’état de spin répond à l’application d’un champ électrique alors que cette réponse est absente dans le cas de l’électron. Cette propriété unique du trou dans le silicium permet d’imaginer de futur qubits de spin « tout électrique » dans des transistors classiques.
Finalement ces travaux présentent des intérêts multiples : tout d’abord fondamentaux puisqu’ils démontrent que des transistors peuvent être utilisés pour l’exploration des propriétés fondamentales du spin dans le silicium, mais aussi applicatifs puisqu’ils mettent en avant le potentiel des transistors conventionnels pour un futur ordinateur quantique.
Figure : Vision schématique d'un transistor silicium sur isolant dans lequel un spin unique peut être piégé sous la grille à basse température.